Depuis l’instauration de la victoire à trois points en France, au milieu des années 90, coachs et présidents, joueurs et supporters, nous ont tous (ou presque habitué à un adage malheureusement bien trop commun: « l’important c’est les 3 points ». A travers cette nouvelle chronique, je tenterai, jamais loin du terrain, de partager avec vous mes impressions et mes émotions après chaque journée de Ligue 1 histoire de montrer que non, il y a parfois tout aussi important. J’écrirai 38 chapitres, 38 épisodes de ce feuilleton toujours aussi décrié et pourtant si chéri, de cette Ligue 1 à l’omniprésence grandissante dans le quotidien de chacun, passionnés de France et de Navarre.
Aujourd’hui plus qu’hier, et sans doute encore moins que demain, l’ère nouvelle créée par Internet et l’instantané oblige l’immense majorité des acteurs du foot moderne à pratiquer une langue de bois toujours plus développée. Et vous, lecteurs fidèles et assidus de blog depuis maintenant 4 longues années le savez, la langue de bois et ses déclarations aussi creuses que banales est ma plus grande hantise.
Lâche parade de communicant, la langue de bois contente tout le monde, ne vexe personne – puisqu’elle ne dit rien – et tend à bousculer le moins de code possibles. Il faut dire que c’est efficace, une polémique s’embrase, et hop, ni vu ni connu, la langue de bois éteint l’incendie.
Prenez une équipe surprise qui se retrouve à jouer les premiers rôles contre toute attente. Question : « Jouez-vous le titre ? » Réponse « On prend les matchs les uns après les autres« . (Cette formule pourrait d’ailleurs entrer dans l’excellent livre de Frédéric Pommier, journaliste à France Inter, qui regroupe les pires faits communs pourtant devenus bien trop courants.) Reste que cette phrase enfume tout le monde; histoire de ne pas dire qu’on joue le titre, mais de ne pas dire non plus qu’on ne le joue pas. Pour ce qui est de la forme de l’expression, évidemment qu’une équipe ne peut pas faire autrement que de jouer les matchs les uns après les autres. Et le jour où un coach trouvera la parade, le championnat sera réglé plus tôt que prévu. Belle affaire.
Entraîneur, comme joueurs, baignent ainsi dans ce monde sinistre et silencieux où le silence prime souvent sur l’honnêteté. Les conférences de presse sont souvent inintéressantes, et les vrais enseignements se font rares. Les médias font peur, les médias feraient et défraient le sort d’un club, d’une équipe, au gré de quelques lignes. Leur donner de la matière, sur une maladresse à chaud par exemple, serait un drame diplomatique.
Fort heureusement, il existe des exceptions. Ce week-end, d’où la signature de ce papier aujourd’hui, des joueurs se sont lâchés, dès l’instant où le coup de sifflet final avait retenti ! Comme si la sortie du terrain était l’unique endroit pour recueillir des mots de joueurs sans calcul. J’aurais pu vous parler de Geoffrey Jourden, spécialiste en la matière, mais, pour le coup, la réflexion ne semble pas assez réelle ni poussée pour en tirer des enseignements.
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Prenons donc Ryad Boudebouz qui, à la sortie du match nul concédé face à Dijon (3-3) et le plus lucidement possible, a fustigé le comportement défensif de son équipe. Tout aussi perspicace, c’est Thomas Didillon, le gardien messin, qui a remis à sa place un journaliste trop conciliant après la déroute des promus face à Monaco (0-7). Le monde du foot à ses codes, y baigner en continu oblige à s’y imprégner. Et les mots de Didillon détonnent. Mais nous offre surtout un immense bol de fraîcheur et d’inédit.
L’ouverture des vestiaires aux caméras par Pascal Dupraz tranchent également avec toutes les arguties habituelles et les parades de langage, si communes au monde du foot. Le temps où Pedretti se faisait insulter de « tarlouze » par Nicollin semble déjà loin, celui où Cantona injuriait son coach avec l’éblouissante formule de « sac à merde » semble quant à lui irréel.
Les choses se bousculeront peut-être, ou pas, et viendra un jour où les analyses communes et les réponses aussi bien préfabriquées que du mobilier Ikéa seront démodées, ou pas. Les chances sont faibles, mais dans tous les cas, on aura de la matière pour condamner fermement cette langue de bois toujours plus insupportable.
A la semaine prochaine,
Tom MASSON
@MassonTom1